Avec Journal d'un cinéphile, Cinoche.com revisite périodiquement un film qui a marqué son époque, une production qui a divisé le public et/ou la critique, une oeuvre phare d'un artiste sur le point de proposer un nouveau projet, ou un long métrage qui nous avait filé entre les doigts au moment de sa sortie.
Aujourd'hui, nous nous penchons sur le cas de...
SISU (Sisu : De l'or et du sang)
Jalmari Helander | Aventures de guerre | Finlande | 2023 | 91 minutes
À mi-chemin entre le film de guerre et le western, Sisu du cinéaste finlandais Jalmari Helander est sorti d'un peu nulle part en début d'année. Les amateurs de films d'action y ont trouvé une proposition musclée et pour le moins sanglante faisant efficacement tourner la roue, à défaut de la réinventer.
Le long métrage s'inscrit dans la mouvance des récits de vengeur solitaire particulièrement doué pour la dépopulation tels que repopularisés ces dernières années par John Wick et autres Nobody.
Nous suivons cette fois-ci Aatami (Jorma Tommila), un ancien militaire finlandais, au crépuscule de la Seconde Guerre mondiale. Ce dernier arpente alors les vastes contrées de son pays natal avec son fidèle compagnon canin à la recherche d'or.
Lorsque le fruit du labeur d'Aatami est finalement récompensé - et pas qu'à moitié -, l'homme croise sur le chemin du retour un convoi de soldats nazis repoussé dans ses derniers retranchements.
Découvrant le butin de l'homme, le leader des troupes tente de mettre la main sur le magot, sachant pertinemment que l'avenir s'annonce assez sombre pour les troupes allemandes.
Ce dernier fait toutefois l'erreur de sous-estimer son adversaire, que les Russes ont surnommé « l'immortel », en raison de sa propension à empiler les cadavres tout en déjouant lui-même la mort.
Les comparaisons avec le long métrage de Chad Stahelski et David Leitch sont en soi inévitables. En plus du chien qui accompagne sporadiquement notre héros - et dont nous craindrons souvent pour la vie -, la présentation de l'aura mythique d'Aatami fait directement écho à la scène de l'explication du surnom « Baba Yaga » dans l'opus de 2014.
Ce qui saute d'abord aux yeux, c'est la manière particulièrement inspirée dont Helander utilise les grands espaces à sa disposition pour offrir des plans larges époustouflants, tout en contenant la cruauté et la barbarie de son scénario à l'intérieur de cadres beaucoup plus rapprochés. La distinction entre ces deux approches est d'ailleurs aussi marquante qu'articulée.
Sisu étant un film peu bavard à la base, la mise en scène, le montage et la direction photo sont si soignés et précis que tout passe ici par le visuel. Vous pourriez visionner le film en sourdine et comprendre les moindres rudiments de l'intrigue. Ce qui n'est définitivement pas peu dire en 2023.
Certes, Sisu ne gagnera aucun prix pour l'originalité de sa prémisse, et base une grande partie de son plaisir ludique sur la simple joie universelle de voir des nazis se faire estropier.
Mais après être passé à travers une quantité astronomique de films de superhéros dans lesquels les personnages semblent de plus en plus faits de caoutchouc, il est rafraîchissant de voir un héros devant en prendre pour son rhume avant de triompher, et ce, au point de donner au spectateur une quantité non négligeable de malaises et de frissons dans le dos.
Jorma Tommila est d'ailleurs très efficace dans ce rôle à la fois physique, vulnérable, impitoyable et quasi muet.
Évidemment, le long métrage regorge de séquences d'action tout aussi juteuses que savoureuses et bien tournées (notamment celles du champ de mines, du lac et du convoi), dans lesquelles la violence oscille parfaitement entre le carnage et un épisode des Looney Tunes.
Et en s'étalant sur seulement 91 minutes, Sisu demeure un bel exemple de concision, parfaitement conscient de ce qu'il a à offrir, et ne cherchant jamais à étirer la sauce inutilement.
Sisu est présentement disponible sur Crave, en formats DVD et Blu-ray, et à l'achat ou à la location en vidéo sur demande.