Avec Journal d'un cinéphile, Cinoche.com revisite périodiquement un film qui a marqué son époque, une production qui a divisé le public et/ou la critique, une oeuvre phare d'un artiste sur le point de proposer un nouveau projet, ou un long métrage qui nous avait filé entre les doigts au moment de sa sortie.
Aujourd'hui, nous nous penchons sur le cas de...
ELF (LE LUTIN)
Jon Favreau | Conte | États-Unis | 2003 | 97 minutes
Nous connaissons tous au moins une personne qui, à minuit le 1er novembre, a déjà sorti ses décorations de Noël et ses gilets festifs, en plus d'avoir déjà commencé à fredonner très fort « All I Want for Christmas Is You » de Mariah Carey avant même que la diva ait pu sortir de son hibernation.
Il y a vingt ans, Jon Favreau, Will Ferrell et New Line Cinema entendaient l'enthousiasme illimité de tous ces individus dont le calendrier de l'avent aurait cruellement besoin d'une extension en proposant le film Elf dès la première semaine menant lentement (ou très rapidement, c'est selon) au temps des Fêtes.
Le long métrage est désormais considéré comme un classique du genre. Mais pourquoi a-t-il autant marqué les esprits?
Après tout, sur papier, il s'agit de l'histoire classique d'un poisson hors de l'eau. Et il n'y a rien dans la trame dramatique du scénario de David Berenbaum pour déroger de cette formule éculée.
Et c'est parfait ainsi.
Elf raconte l'histoire de Buddy (Ferrell), qui doit un jour accepter le dur constat qu'il n'est pas un lutin du père Noël. Il décide dès lors de quitter les paysages féériques du pôle Nord, et de voguer sur un bloc de glace vers New York, le coeur rempli d'espoir de pouvoir retrouver son père biologique (James Caan), un éditeur de livres jeunesse sans scrupule et obsédé par son travail.
La réussite de Elf repose avant tout sur un dosage extrêmement minutieux de l'ensemble des ingrédients.
Will Ferrell joue les personnages candides au coeur d'enfant avec un enjouement et une sincérité le tenant toujours à bonne distance du cabotinage.
L'humour du film - étonnamment très varié - trouve son élan en visant un public plus mature (la séquence du café alcoolisé dans la salle de tri du courrier demeure une scène d'anthologie), mais en ne perdant jamais de vue sa prémisse enfantine.
Certes, le scénario ne se gêne pas pour faire tout un cas du clash entre l'univers de livre pour enfants du pôle Nord et le cynisme ambiant du monde réel. Mais Favreau et Berenbaum jouent bien leurs cartes en n'étirant pas la sauce en ce qui a trait à la réaction initiale des autres personnages - notamment celui de Zooey Deschanel - face à Buddy.
À titre comparatif, le tout n'est pas sans rappeler - dans un tout autre registre - la façon dont le protagoniste interprété par Kevin Costner dans Field of Dreams parvenait très rapidement à convaincre son entourage de la légitimité de son projet de bâtir un terrain de baseball dans un champ de maïs pour y faire jouer quelques fantômes.
La finale poussant ici la note quant à l'idée que de se laisser envahir par l'esprit de Noël ne peut que rendre le monde meilleur, il est tout à fait logique que cette retenue et cette appréhension n'aient pas la couenne dure, et que les maîtres de cérémonie aient décidé de ne pas trop enfouir profondément ce sentiment de légèreté au fin fond de leurs personnages.
Comme cette personne infiniment motivée qui garderait volontiers son sapin de Noël dans son salon toute l'année durant, Elf nous rappelle que toute résistance à l'esprit des Fêtes est aussi inutile que contre-productive.
Elf est présentement disponible sur Crave, en formats DVD, Blu-ray et UHD 4K, et à l'achat ou à la location en vidéo sur demande.