Avec Journal d'un cinéphile, Cinoche.com revisite périodiquement un film qui a marqué son époque, une production qui a divisé le public et/ou la critique, une oeuvre phare d'un artiste sur le point de proposer un nouveau projet, ou un long métrage qui nous avait filé entre les doigts au moment de sa sortie.
Aujourd'hui, nous nous penchons sur le cas de...
DAWN OF THE DEAD (L'aube des morts)
Zack Snyder | Suspense d'épouvante | États-Unis | 2004 | 101 minutes
Pour de nombreux cinéphiles, le Dawn of the Dead de George A. Romero est un intouchable dans la grande Histoire du cinéma d'horreur.
Donc, comme pour toute bonne chose sacrée, Hollywood ne s'est pas gêné pour tenter de remettre ce classique au goût du jour à un moment jugé opportun.
Et ledit moment opportun est arrivé en 2002, lorsque Danny Boyle a causé la surprise générale en s'aventurant du côté du film de zombies avec 28 Days Later.
Comme nous apprenions récemment que Boyle et Alex Garland travaillent activement sur 28 Years Later, et que le maître de cérémonie du présent exercice, Zack Snyder, a reçu un accueil pas aussi enthousiaste qu'anticipé, en décembre dernier, lors de la sortie de la première partie de son épopée intergalactique Rebel Moon, nous avons jugé que le moment était certainement opportun pour revisiter cette relecture étonnamment supérieure à la moyenne.
Mais avant de plonger dans le vif du sujet, une petite parenthèse!
Le premier long métrage de Zack Snyder a été scénarisé par un certain James Gunn.
Quelques années plus tard, le premier allait être chargé de prendre les rênes de l'univers cinématographique de DC Comics, et le second allait être chargé de reprendre les rênes de l'univers cinématographique de DC Comics lorsque Warner Bros. allait juger que le premier n'était plus l'homme de la situation.
Vous êtes familier avec l'expression « toute est dans toute »?
Nous nous garderons néanmoins une petite gêne pour ce qui est de parler d'une franchise... « morte-vivante ». Excusez-la!
Fin de la parenthèse.
Dawn of the Dead a été l'un des premiers films à suivre les traces de 28 Days Later en transformant le zombie en une menace beaucoup plus rapide et agressive que par le passé.
À l'instar de Boyle, Snyder s'est lui aussi tourné vers le numérique pour donner un style beaucoup plus crue à son long métrage, mais les limitations de l'époque sont malheureusement encore plus visibles aujourd'hui. Ceci étant dit, nous pouvions déjà entrevoir le genre d'architecte visuel que le cinéaste américain finirait par devenir.
Revoir Dawn of the Dead aujourd'hui nous confirme, entre autres, que la grande histoire d'amour entre Snyder et les images de douilles tombant au ralenti ne date pas d'hier.
Un peu comme Steven Soderbergh l'avait fait avec son Solaris deux années plus tôt, Snyder et Gunn proposent une version épurée au possible du récit de Romero, évacuant en bonne partie le discours sur le capitalisme de l'oeuvre originale pour offrir une expérience beaucoup plus viscérale.
Le présent opus est strictement une affaire de survie au temps de l'apocalypse. Une idée que la brutale et frénétique séquence d'ouverture se déployant au rythme de la pièce « The Man Comes Around » de Johnny Cash exprime allègrement.
Par la suite, Snyder et Gunn utilisent l'emblématique centre commercial comme un microcosme pour y faire interagir des survivants issus de différents milieux et n'ayant pas tous les mêmes convictions, ressources et croyances pour faire face à cette situation unique.
Certains ont bien compris l'importance de l'esprit de groupe, tandis que d'autres ne désirent que sauver leur propre peau.
Le duo réserve d'ailleurs un superbe arc dramatique au personnage de CJ (interprété par Michael Kelly), le cowboy de service à la moustache imposante, alors que tout semble indiquer que ce dernier rejoindra le groupe seulement pour mieux le trahir plus tard. Mais il n'en est rien.
Parfois, un individu peut finir par comprendre le gros bon sens, nous disent Snyder et Gunn. Et il s'agit assurément de l'une des plus belles démonstrations d'optimisme du duo dans un film se vautrant autrement dans une marre de nihilisme.
En contrepartie, l'iconique « When there's no more room in hell, the dead will walk the earth » est placé ici dans la bouche d'un prêtre effectuant un discours haineux, homophobe et antiavortement, tandis que la société s'écroule autour de lui.
Le scénario de Gunn multiplie les prises de position et les points de vue sur la religion à l'heure du jugement, mais il le fait autant pour témoigner d'une forme d'hypocrisie et d'opportunisme crasse, ainsi que des valeurs vétustes qu'elle tend à véhiculer, que pour en célébrer l'esprit d'entraide, de compassion et de communauté.
Entre ses excès de gore et son humour noir, Dawn of the Dead se veut avant tout un film de personnages devant composer avec un enchaînement de dilemmes moraux, tandis que l'humanité ne semble plus tenir qu'à un fil, et que la lumière au bout du tunnel s'éteint petit à petit.
À cet égard, Snyder peut définitivement remercier ses principales têtes d'affiche (Sarah Polley, Ving Rhames et Jake Weber) pour leurs performances empreintes d'autant de force de caractère que d'empathie et de vulnérabilité.
Même s'il n'atteint en aucun cas les sommets de sa source d'inspiration, Dawn of the Dead demeure une relecture efficace et tout à fait respectable d'une oeuvre maîtresse du genre.
Dawn of the Dead est présentement disponible en formats DVD, Blu-ray et UHD 4K, ainsi qu'à l'achat ou à la location en vidéo sur demande.