Le premier long métrage à titre de réalisateur de Joseph Gordon-Levitt, titré Don Jon, prend l'affiche dans les cinémas dès vendredi. Lors du Festival du Film de Toronto, nous avons rencontré l'acteur, réalisateur et scénariste, qui était particulièrement excité de présenter son premier film au public.
« Réaliser, c'est très différent de jouer, dit-il d'emblée. Quand on joue, on doit se concentrer sur une seule chose, alors que lorsqu'on réalise on doit penser à tout. En tant qu'acteurs, nous recevons le scénario simplement quelques mois avant le tournage, alors que personnellement je réfléchis à cette histoire depuis plusieurs années. J'ai réfléchi à tous les éléments, à ce que je voulais exactement, ce que la caméra ferait et quel serait rôle la musique par exemple. »
Comment gériez-vous votre rôle de réalisateur et celui d'acteur concrètement sur le plateau? « Quand je joue, je suis capable de savoir quand une scène est juste. Alors, je ne retournais pas derrière la caméra tant que je n'avais pas ressenti cette rectitude. Quand je la ressens enfin, je demande aux acteurs s'ils sont en accord, s'ils trouvent que la scène était bien, et après, je demande au directeur-photo si c'était bon pour les caméras, et quand tout le monde est satisfait je vais regarder les playbacks. Après si ce n'est pas parfait, on retourne la scène. »
Beaucoup de réalisateurs ont peur de prendre trop de temps d'exposition quand ils jouent aussi dans le film. Est-ce votre cas? « J'ai fait beaucoup de courts métrages et de vidéos. Sans exagération, probablement une centaine. Pour mon anniversaire de 21 ans, je me suis acheté une licence de Final Cut, un logiciel de montage, et j'ai passé beaucoup de temps à me filmer et à retourner devant mon ordinateur pour faire du montage, et à voir comment le tout fonctionnait ensemble. Alors j'étais déjà habitué à ce procédé, à me voir à l'écran. Peut-être effectivement que si je n'avais pas fait ce genre d’exercices j'aurais été gêné d'être aussi présent à l'écran, mais ce ne fut pas le cas. »
Votre film a un style particulier, différent des comédies traditionnelles. « La plupart des comédies sont assez conservatrices au niveau du style parce qu'elles veulent que notre attention soit davantage portée sur les textes et sur le jeu des acteurs, mais, personnellement, je voulais que les textes et le jeu soient un complément à l'image et au montage. C'est ce qui était très intéressant pour moi dans le fait de réaliser, parce que j'avais la chance de jouer avec tous les outils. J'ai longtemps pensé au style que je voulais apporter à mon film. L'esthétique, la musique, le montage, tout ça est en lien direct avec la manière dont les personnages évoluent au sein de l'histoire. »
Pourquoi cette histoire de Don Juan des temps modernes pour votre premier film? « J'ai grandi sur les plateaux de tournage de télévision et de cinéma. Et j'ai tellement entendu souvent des gens dire : « Pourquoi ma vie ne ressemble pas à ce film » et « Pourquoi je ne peux pas rencontrer un gars comme ton personnage dans le film », et je trouvais ça légèrement troublant. Les gens s'exposent à de grandes déceptions quand ils se comparent ainsi... Je dis « ils » mais je suis également coupable de ça. C'est quelque chose de très tentant de simplifier sa vie en la comparant à un idéal, mais la vie est beaucoup plus complexe que les fantasmes qu'on nous présente à l'écran. »
Pourquoi avez-vous choisi Scarlett Johansson pour le premier rôle féminin? « J'ai écrit le rôle pour elle, je ne savais pas si elle allait dire oui, mais j'étais optimiste. C'est une femme très talentueuse. Elle parvient à trouver l'équilibre entre l'humour et la sincérité, et c'est quelque chose de très difficile à trouver. Il y a une raison pour laquelle elle est dans tant de films de Woody Allen. Pour moi, Woody Allen est le maître pour trouver cet équilibre entre humour et sincérité émotionnelle. Je pense aussi qu'elle est parfaite parce que ce film explique un peu comment les femmes sont considérées comme des objets sexuels. Notre société est coupable de faire de Scarlett un objet sexuel. Elle est tellement intelligente, tellement talentueuse, et pourtant la seule chose dont tout le monde parle est de sa beauté. Elle est tellement plus que ça. »
Vous avez dû avoir un régime et un entraînement rigoureux pour arriver au corps de Jon. « Je m'entraînais tous les jours et je mangeais beaucoup de protéines et de poulet. Mais c'est dans ma construction du personnage. Ce dernier a une opinion très rigide en ce qui concerne ce à quoi un homme devrait ressembler et il veut vraiment entrer dans ce moule. Il est très discipliné. Il va au gym tous les jours, pour être certain que son apparence soit parfaite. »
« Les trois réalisateurs avec lesquels j'ai travaillé avant de faire Don Jon; Christopher Nolan, Steven Spielberg et Rian Johnson avaient un plan, mais ils étaient toujours ouverts aux idées des autres. C'est l'une des plus grandes qualités d'un réalisateur que de rester ouvert. »
En plus de Joseph Gordon-Levitt et Scarlett Johansson, Don Jon met également en vedette Julianne Moore, Tony Danza, Glenne Headly et Brie Larson.