Le long métrage français 11.6, qui prenait l'affiche en France hier, sera présenté au Québec dès demain. Le film, distribué par Remstar, est inspiré de l'histoire vraie de Tony Musulin, un convoyeur de fonds arrêté en 2009 pour le vol de 11,6 millions d'euros.
François Cluzet incarne le personnage principal. Il retrouve derrière la caméra Philippe Godeau, qui agit aussi à titre de scénariste et de producteur. Les deux hommes ont déjà travaillé ensemble en 2009 pour le film Le dernier pour la route. Bouli Lanners incarne le meilleur ami et compagnon de travail de Musulin tandis que Corinne Masiero personnifie sa conjointe.
Tony Musulin a minutieusement préparé son coup, jusqu'à couper les ponts avec ses proches quelques mois avant le vol, qui est survenu le 5 novembre 2009. Deux jours après le vol, la police a retrouvé 9,1 des 11,6 millions d'euros volés par Musulin, qui s'est finalement rendu à la police monégasque le 16 novembre. On ignore ce qu'il est advenu du reste de l'argent, mais ce dernier a toujours nié l'avoir pris. C'est plutôt sur des charges de fraude à l'assurance qu'il a été condamné à cinq ans de prison en 2010.
« C'est un fait divers qui a beaucoup remué à Paris. Les gens ont tous pensé : c'est un héros, le type a gagné au loto. Moi ce qui m'intéressait c'était de penser que le type n'avait pris aucun risque finalement. Ce qui est plus intéressant dans le film, c'est la crise d'identité du personnage. C'est pour ça que j'ai fait le film. », nous dit Cluzet, qui était impliqué dès le début du projet.
Pour lui, le personnage est plus important que le vol. « On a enlevé la plupart des dialogues qu'il y avait dans le script car je voulais un personnage muet, et en accord avec Godeau on se disait que ce qui était intéressant, c'est le maelstrom qu'il a dans sa tête. Comment va-t-il sortir de cette humiliation? Au-delà de l'argent, ce qu'il veut, c'est vraiment renvoyer ses supérieurs, montrer qu'ils sont mauvais, que les consignes de sécurité ne sont pas respectées. Il vit une humiliation permanente. »
« Le type est seul en lui-même, il ne parle pas, il essaie de cacher ce qu'il ressent pour se donner la force de passer à l'acte. Il vit quelque chose de très solitaire, il vit ce drame de façon intérieure. »
Sans surprise, le réalisateur est du même avis. « Ce qui m'a donné envie de faire le film, c'est l'homme. C'est un homme qui aurait pu mettre son poing sur la gueule de son patron, il aurait pu faire une action syndicale sur la façon dont sont traités les gens comme lui, mais finalement, sa façon de réagir, c'est de rentrer chez lui et de planifier le vol d'un camion. Comme il aime faire les choses bien, il attend qu'il y ait beaucoup d'argent, et finalement, il fait le casse du siècle. »
Comme l'histoire est inspirée d'un fait vécu, avez-vous la responsabilité de raconter fidèlement les événements? « Non, car c'est une fiction. Évidemment, le cinéma que j'aime, qui m'intéresse, il est ancré dans la réalité. Curieusement, parfois la vérité peut faire faux et le faut peut faire vrai, alors ce qui est important c'est de raconter les valeurs, et de respecter les gens. »
« Je pense qu'on peut faire des fictions honnêtes et des documentaires malhonnêtes, qui transforment la réalité. La façon dont tu montes, tu découpes, tu sais déjà ce que tu veux démontrer, tu te sers de choses soi-disant réelles pour démontrer quelque chose... Il y en a eu beaucoup. »
Pour François Cluzet, ses gestes ne font pas de Tony Musulin un héros ou un Robin des bois. « Ce que je trouvais intéressant du film, c'est qu'il va chercher la face cachée de Musulin. Pour les gens, c'est un héros, mais nous ce qu'on voulait montrer c'est la vie cachée de ce type-là; ça ne va pas très bien avec sa femme, ni avec son pote, il est capable du pire. La seule chose où il est héroïque à mon avis c'est qu'il puisse mettre en scène de se fâcher avec eux pour qu'ils ne soient pas inquiétés. Là oui, c'est un héros. »
Le film 11.6 prend l'affiche en France aujourd'hui. Il est assez rare qu'un film français sorte chez nous presque en même temps qu'en France, soit, dans le cas suivant, deux jours après. « C'est effectivement assez rare; néanmoins, c'est quelque chose qu'on tentera de faire autant que possible chez Remstar si différents facteurs le permettent », explique Tim Ringuette, directeur des acquisitions et de la distribution chez Remstar.
« Dans le cas de 11.6, nous avions le matériel promotionnel depuis plusieurs semaines déjà et la presse québécoise a pu réaliser des entrevues avec le réalisateur ainsi que François Cluzet à Paris en janvier dernier. La date de sortie nous convenait en plus de pouvoir bénéficier de l'impact publicitaire et médiatique en France, Toni Musulin (le véritable protagoniste du film) étant un phénomène là-bas en plus de la popularité de Cluzet bien entendu. Du coup, ça évitera d'étirer inutilement les délais pour les fenêtres suivantes; DVD, vidéo sur demande, télévision. »
« C'est évidemment du cas par cas, mais lorsque c'est possible, comme dans le cas de 11.6, c'est un plus pour le public québécois d'être parmi les premiers au monde à avoir accès au film, en même temps que dans son pays d'origine », conclut Ringuette.