La comédie n'a plus de secret pour le cinéaste James Huth. Le père de Brice de Nice s'attaque à un monument du cinéma français en proposant un remake du légendaire film Le jouet de Francis Veber. Jamel Debbouze se glisse dans la peau de l'inoubliable personnage campé par Pierre Richard et il se fait littéralement acheter par le fils de l'homme le plus riche de France (Daniel Auteuil).
Cinoche.com s'est entretenu avec le réalisateur dans le cadre des Rendez-vous du cinéma français d'Unifrance...
Quelle est votre relation avec le long métrage Le jouet ?
C'est un film qui m'a fait rêver quand j'étais môme. J'ai rêvé avec ce môme qui traversait son appartement en voiture, qui avait une chambre si grande qu'on pouvait y mettre deux baby foots. Quand je l'ai revu adulte, j'ai vu un film totalement différent. J'ai vu une satire au vitriol de la société. C'est loin d'être une comédie. Ni les riches ni les pauvres ne s'en sortent. C'est probablement le film le plus dur de Veber, ce qui en fait sa force.
Faire un remake d'un film culte n'est pas un sacrilège? Il n'y a pas une peur, un risque de s'attaquer à un matériel aussi populaire? Vous, vous y êtes déjà frottés par le passé avec Lucky Luke...
Bien sûr. C'est complètement suicidaire comme démarche. (rires). En fait, c'est déjà impossible de réussir un film. Après, le plus dur, c'est de réussir une comédie. Alors tant qu'à faire, autant essayer de chercher encore plus infaisable! (rires) Je n'aurais jamais eu l'idée de m'attaquer à cette chose-là si le producteur ne l'avait pas proposé. La première chose que je lui ai dite est "Tu es complètement fou!". Ensuite, j'ai vu qu'il y avait un autre film à faire sur l'émotion, les relations père/fils, avec des thèmes qui sont beaucoup plus actuels aujourd'hui qu'ils l'étaient à l'époque, comme la fracture sociale, la place de l'enfant-roi, si l'argent peut tout acheter, etc.
Vous avez réalisé plusieurs comédies par le passé comme Rendez-vous chez les Malawas, Un bonheur n'arrive jamais seul et Serial Lover. Avec ce type de sujet, comment détermine-t-on l'humour? Est-ce qu'il sera plus physique, absurde, ironique, méta, de situations?
Il a quelque chose de très fort sur ce film-là et on le doit à Francis Veber. C'est le thème du film, son noyau dur: le fils de l'homme le plus riche de France achète un être humain. C'est tellement dur que c'est une base formidable pour la comédie. Quand on y pense, les meilleures comédies sont tirées de quelque chose de dramatique, que ce soit les films de Chaplin ou Some Like It Hot. Ça nous donne déjà une direction. Une direction qui est plus comique de situations que de comique de blagues. Car on parle de choses profondes. La comédie jaillit au moment où il y a une émotion un peu trop forte et à l'inverse, l'émotion vient arrêter une comédie qui pourrait aller un peu trop loin. C'est grâce au matériau, à la matière noire, qu'on balance la matière lumineuse.
On n'imagine personne d'autre que Jamel Debbouze dans ce rôle.
On s'interdit toujours de penser à des acteurs. Mais plus on écrivait et plus Jamel se dessinait. C'est Daniel Auteuil qui a appelé Jamel quand il a vu le script. Ils sont voisins. Effectivement, ça transpirait Jamel. Il n'y a que lui. Qu'est-ce qui va se passer s'il nous dit non? On a eu cette chance qu'il dise oui. On a réécrit avec Jamel toutes les scènes qui se déroulent dans la cité pour qu'elles soient réalistes. On s'est basé sur ses souvenirs.
Le choix de Daniel Auteuil est également une excellente idée.
Quel acteur incroyable et quel homme! Il est d'une émotion qui jaillit de ce corps, même immobile. Il y a une fêlure dans ce personnage-là qui est handicapé de ses relations, qui se sacrifie pour sa compagnie et qui donnerait tout son argent pour passer du temps avec son fils. Il faut se rappeler qu'il y a des êtres humains de tous les côtés. C'est ce qui donne la chair au film. Finalement, tu as deux hommes qui sont totalement opposés, qui sont terrifiés à l'idée d'être père, qui ne savent pas comment faire et qui font un chemin pour y arriver.
Quelles sont vos comédies préférées?
J'ai grandi avec le slapstick et les films de Peter Sellers, des Marx Brothers, de Billy Wilder, des Monty Python, de Charlie Chaplin, d'Harold Lloyd, de Laurel et Hardy avec l'accent français. Ce sont mes références. Dans le cinéma plus récent, c'est vrai que Jim Carrey est un type qui a marqué son époque. Le dernier film où j'ai vécu dans une salle une communion de comédie comme on le voit juste une ou deux fois dans la vie, c'était pour The Hangover. Les gens pleuraient de rire. Tu as 400 personnes et le spectacle est autant dans la salle qu'à l'écran. Comme metteur en scène, tu te dis que faire vivre ça à une audience, c'est vraiment super. C'est un souvenir fou.