Whitewash, le premier film du réalisateur et comédien Emanuel Hoss-Desmarais, prendra l'affiche ce vendredi. Le long métrage raconte l'histoire d'un homme du nom de Bruce, joué par Thomas Haden Church, qui frappe Paul, interprété par Marc Labrèche, avec sa déneigeuse un soir de tempête. Paniqué, il décide d'enterrer le corps et de s'enfuir pour se cacher dans la forêt. Maintenant seul, il doit affronter les démons du remords qui le ronge.
« Whitewash est né d'un flash assez fou. Il y avait déjà de l'humour noir dans le concept même d'un homme qui abat un autre homme avec une déneigeuse à trottoir et qui s'enfuit dans la forêt pour se cacher pendant un hiver de temps », explique le cinéaste. « Le scénariste Marc Tulin et moi, on se disait qu'il y avait un potentiel cinématographique là, mais nous ne savions pas s'il y avait une histoire. Alors il a fallu qu'on se creuse la tête pour savoir s'il était possible de construire un drame, de donner un arc dramatique à tout ça. »
Pourquoi avoir choisi de faire ce film en anglais plutôt qu'en français? « Marc et moi nous sommes parfaitement bilingues. On avait le choix, on pouvait l'écrire en français ou en anglais. Marc est peut-être légèrement plus à l'aise en anglais pour l'écriture. Les producteurs nous ont dit, à l'époque où on demandait le financement, il y a quelques années déjà, que la branche francophone était vraiment contingentée, qu'il y avait vraiment beaucoup de demandes. On était dans les années où Robert Lepage venait de se faire refuser son financement et là c'était la grande question au Québec... Est-on vraiment rendu à refuser des projets à Robert Lepage? Vraiment? Alors les producteurs nous ont conseillé de le faire en anglais, que le financement serait peut-être ainsi plus facile à obtenir. »
Tourner l'hiver doit représenter des défis importants... « Oui, ça été assez difficile. Mais le challenge était l'fun. En amont, nous nous sommes donnés pleins de trucs, nous nous envoyions plein d'e-mails; telles crèmes pour protéger le visage, tel type de sous-vêtements pour bien transpirer dehors. Et nous n'avons pas eu un hiver si froid que ça (NDLP : le film a été tourné à l'hiver 2012), donc ça nous a vraiment aidés. »
L'acteur Thomas Haden Church s'est imposé d'emblée? « Nous avions quelques noms en tête et Thomas était dans nos premiers choix. Nous nous sommes assis avec une directrice de casting américaine et nous lui avons soumis nos choix. Rapidement, elle nous a nommé ceux qui n'étaient pas disponibles et Thomas était libre, alors nous l'avons essayé, et il a accepté. Nous étions vraiment heureux. »
« Pour Marc, c'est un flash qui nous est venu au moment de faire le casting. Je trouvais ça drôle. J'aimais l'idée de l'amener ailleurs. J'aimais aussi, non seulement l'idée du contre-emploi, mais, celle d'aller chercher ce côté plus pathétique et triste en lui. »
Le personnage qu'incarne Marc Labrèche est très mystérieux, on connaît très peu de choses de lui. « Le personnage de Bruce, joué par Thomas, est beaucoup plus clair; on voit où il habite, on sait qu'il a perdu sa femme du cancer, qu'il déneige les rues de sa petite ville avec sa déneigeuse, mais celui de Paul, le personnage que je joue, est très nébuleux. Mais, je trouve que c'est ce qui fait son charme. Quand j'ai lu le scénario j'ai été charmé par cet univers-là où rien n'est défini vraiment, à commencer par le ton du film en soi qui n'est pas une comédie, ni un drame, qui est un peu des deux. Comme dans la vie avec des fois des mots, souvent des silences, et où les gens se demandent s'ils se comprennent bien lorsqu'ils se parlent : est-ce que c'est ça que tu as voulu dire? Toutes ces ambivalences-là, c'est ça moi qui m'a touché particulièrement. »
Est-ce qu'il est important de s'imaginer les détails qui ne figurent pas dans le scénario pour bien bâtir un personnage? « Pas pour moi, ça dépend des gens, je pense. On peut s'amuser quand on a le temps et le luxe de le faire. On peut s'imaginer son passé, mais dans le cas de ce film-ci ça pouvait être tout et son contraire en même temps. Ça pouvait être quelqu'un qui a réussi dans la vie et qui a tout perdu parce qu'il s'est adonné au jeu où il s'est fait volé, ou s'est fait prendre à voler, ou alors c'est quelqu'un qui n'a jamais rien eu dans la vie et qui a toujours vécu au crochet des autres. Les deux se pouvaient. Personnellement, je n’ai pas besoin d'avoir une banque. Elle finit par me paralyser parce que je me demande toujours si on comprend pourquoi je fais telle chose, si le message passe bien. Quand on pense trop, on finit par se mélanger dans ses propres idées. Je préfère faire ce qui sert la scène maintenant. »
L'anglais est-il un obstacle pour vous? « Non, au contraire. Si j'avais eu à jouer un personnage londonien, ce serait autre chose, mais comme le personnage est francophone, je n'avais pas besoin d'un accent parfait. C'est vraiment super intéressant de jouer en anglais parce qu'en anglais tu te reposes de toi-même. Ça donne un recul de ne pas être dans la même langue que d'habitude, dans le même souffle. Tu viens casser ta respiration, ça permet autre chose. »
Whitewash est à l'affiche dès demain à Montréal, Québec, Gatineau et Sherbrooke.