En 2010, 33 personnes sont restées prisonnières d'une mine pendant 69 jours. Une tragédie qui a marqué au fer blanc le Chili. Cela n'a pas pris de temps avant qu'un long métrage de fiction voit le jour et il reçoit l'habituel traitement hollywoodien où tout le monde parle évidemment anglais.
Après une jolie entrée en matière dotée de magnifiques paysages de montagnes, les différents mineurs sont présentés en rafale. Il y a le père inébranlable, celui qui attend un bébé, l'homme qui dort dans la rue, son comparse en froid avec sa soeur, l'autre qui n'arrive pas à faire accepter sa maîtresse à sa mère, etc. Des gros stéréotypes, des clichés ambulants qui annoncent déjà que le scénario (c'est inspiré d'un livre, mais tout de même) restera toujours en surface, qu'il ne voudra jamais explorer les profondeurs de l'âme humaine.
Les analystes prouvent que la mine est instable avec une séquence identique à celle du Titanic, ce qui n'empêche pas nos protagonistes d'être envoyés dans le trou et d'affronter rapidement des éboulements. Cette scène d'action - la seule du film - est tellement ratée que l'on imagine aisément voir retontir Sylvester Stallone qui se pense encore dans Daylight. Les survivants sont acculés dans une pièce minuscule dotée de provisions pour seulement trois jours...
À partir de là, les enjeux se déroulent en deux actes. Les tensions qui apparaissent sous la terre et qui sont calmées par Super Mario. Un personnage défendu par Antonio Banderas qui aura rarement paru aussi charismatique et monolithique. Ces séquences longues et répétitives au possible sont rehaussées par un certain humour (des blagues de cannibales qui ne sont toutefois pas aussi mordantes que dans Alive) et une séance de rêve assez rigolote.
Puis il y a tout le remue-ménage à l'extérieur. Ces proches qui prient, ce gouvernement qui tarde à réagir puisque la mine est privée et ces journalistes qui rôdent comme des vautours. Tous les éléments étaient là pour une satire incendiaire à la Ace in the Hole de Billy Wilder. Elle ne se développera pourtant jamais, car l'accent est surtout mis sur l'être contestataire campé par Juliette Binoche (dans un rôle initialement conçu pour Jennifer Lopez). Peu crédible, passant son temps à crier et à chialer (aucune comédienne ne pleure mieux qu'elle devant la caméra), la grande actrice en donne beaucoup pour pas grand-chose. De quoi lui préférer le toujours juste Gabriel Byrne en ingénieur fataliste et de louanger deux grands retours : celui de James Brolin qui n'a plus les réflexes de son fils Josh et celui de Lou Diamond Phillips qui n'a pas eu une présence aussi importante au cinéma en près de deux décennies.
Tout cela est bien vain puisque la tension est généralement inopérante. Le suspense est aussi probant que dans un épisode de La poule aux oeufs d'or et la réalisation de Patricia Riggen - qui s'enlise à chaque nouveau film depuis son très sympathique Under the Same Moon - manque royalement de nerfs. Ses dialogues plaqués mettent sur un piédestal l'esprit de communauté, la ténacité et la résilience en insistant beaucoup trop sur l'importance de la famille (Banderas le dit trois-quatre fois de suite) et sur la nécessité d'apprendre de ses erreurs. La fibre émotionnelle n'est pas plus atteinte tant le rire ironique et involontaire vient souvent brouiller les cartes. La musique du regretté James Horner est tellement dégoulinante qu'elle donne seulement le goût de revoir l'immense fresque de survie Letter Never Sent de Mikhail Kalatozov.
Plus près du film catastrophe que du drame humain, The 33 relève de la grosse mécanique édifiante où une catastrophe est toujours accompagnée d'un peu d'espoir et vice-versa. Un va-et-vient constant qui ensevelit rapidement l'intérêt. Après avoir touché le fond, il est trop tard pour remonter. Personne ne pourra sauver cette catastrophe, ni Antonio Banderas et encore moins Juliette Binoche. À vouloir suffoquer pendant deux heures dans le noir, mieux vaut le faire avec une oeuvre qui vaut vraiment le détour.