L'entêtement de plusieurs studios à vouloir développer des franchises défie l'entendement. Pourquoi ne pas se contenter d'un succès au lieu d'étirer la sauce et de tout gâcher? Parce que mis à part pour Alien, Scream, Rec et Paranormal Activity, aucune suite de films d'horreur n'a jamais fonctionné et ce n'est pas Sinister qui va renverser la vapeur.
Déjà que le tome original était loin d'être exceptionnel. Sans son atmosphère à faire dresser le poil et le jeu solide d'Ethan Hawke, il s'agissait d'une vulgaire série B qui serait sortie directement en DVD. La production ne fonctionnait qu'à moitié et son scénario était parsemé de trous, ce qui ne l'empêchait pas de faire peur en de nombreuses occasions.
C'est déjà trop demander à ce second volet qui multiplie les clichés, les lieux communs et les effets-chocs usuels. Il n'y a aucun sursaut honnête et pas la moindre petite frousse pour sortir le cinéphile de sa torpeur. Le méchant Boogeyman - ou Monsieur Cruel - ressemble à une version aseptisée de Robert Smith qui disparaît et apparaît plus par ennui que par nécessité. En voilà un qui se ferait sûrement bouffer tout cru par le Babadook. Et ces enfants diaboliques - eh oui encore des enfants, c'est redevenu la mode depuis plusieurs années - n'inspirent certainement pas confiance, ce qui n'est pas une raison pour tout leur mettre sur le dos.
Ils sont pourtant la base des deux idées les plus intéressantes du scénario, qui est à nouveau coécrit par Scott Derrickson et C. Robert Cargill. Une certaine réflexion émane de cette façon de montrer à de jeunes âmes de nombreuses vidéos sanglantes et malsaines. La violence sur supports visuels crée des meurtriers? Qui sait, la trame narrative ne fait qu'aborder cet aspect, préférant se vautrer dans la romance à deux sous. Elle est heureusement interrompue par un mari jaloux qui maltraite ses garçons et qui risque de les pousser à commettre l'irréparable. C'est lorsqu'elle est ancrée dans le drame humain que la terreur atteint des sommets (pensons seulement à Rosemary's Baby, A Tale of Two Sisters ou plus récemment It Follows) et elle offre ici les meilleurs moments de l'ouvrage.
La distribution généralement acceptable évite le naufrage anticipé. James Ransone reprend son rôle un peu gauche de policier devenu détective privé et le comédien qui était si éblouissant dans Tangerine livre une performance honnête, créant les liens avec le récit original. Shannyn Sossamon (A Knight's Tale) incarne pour sa part une mère de famille convaincue qui veut le meilleur pour sa progéniture... même si elle finit par emménager - et surtout déménager - d'un lieu où ont été commis des meurtres brutaux. La réalisation de Ciaran Foy qui remplace Derrickson derrière la caméra est également potable, quoique le cinéaste qui s'est fait un nom avec l'inégal Citadel n'arrive pas réellement à insuffler une personnalité à l'ensemble, le privant même de tout ce qui faisait son charme (notamment ses hommages à Shining, The Conversation et The Ring).
Sans être une insulte à son prédécesseur, Sinister 2 est un long métrage inutile à la finale complètement ratée qui ne renforce nullement la mythologie qui avait été développée de peine et de misère. Plus personne ne se pose de questions sur la raison de ces crimes et à l'image de la série Insidious, il y aura sûrement un antépisode pour saboter encore davantage le brio certes relatif du premier effort. Peut-être que là, on apprendra pourquoi Monsieur Cruel est aussi terne et inoffensif...