Voir Steven Spielberg revenir au film pour enfants relève du fantasme. Surtout s'il se trouve en meilleure forme que sur The Adventures of Tintin. Un retour d'autant plus significatif qu'il s'attaque à un classique du mythique romancier Roald Dahl, dont les adaptations cinématographiques réussies ne manquent pas (Willy Wonka and the Chocolate Factory, James and the Giant Peach, Fantastic Mr. Fox...). Le tout sous les bons soins de Disney qui s'y connaît en la matière. Étrange que le résultat ne soit pas plus marquant.
The BFG débute dans un orphelinat de la Grande-Bretagne, certainement moins lugubre et sinistre que celui d'Oliver Twist mais où l'ennui et la solitude rôdent tout autant. La jeune Sophie (Ruby Barnhill) est incapable de dormir et en sortant sur le balcon, elle aperçoit un gentil géant (Mark Rylance) qui décide de la kidnapper!
Là commence une aventure fabuleuse qui prend son temps à se mettre en branle... ce qui est loin d'être un défaut! Le cinéaste arrête pratiquement l'action et les péripéties pour bien camper cette histoire d'amitié et cette relation presque filiale entre un père de remplacement et sa fille. Il ne s'y passe pratiquement rien: que des mots échangés entre deux individus. Un verbiage sensible et philosophique qui permet de connecter rapidement avec ces personnages, de se rapprocher de la lumineuse nouvelle venue Ruby Barnhill et de renouer avec le diamant brut qu'est Mark Rylance, oscarisé avec raison dans le précédent Bridge of Spies du même réalisateur.
Ce rythme lent n'est évidemment pas pour tout le monde et malgré l'humour et la finesse en place, il y aura toujours quelques âmes qui souffrent de troubles de déficit d'attention qui vont décrocher. Les autres seront plongés dans un univers à part, qui atteint des sommets dans un fantastique royaume des rêves sans dessus dessous qui suscite l'émerveillement à chaque coup.
Y demeurer tout le film aurait été une excellente idée. Parce que lorsqu'on s'éloigne du duo, l'intérêt en pâtit. Il y a tout d'abord ces méchants géants encore plus immenses que notre héros qui viennent semer la pagaille. Alors que la technologie en place est sidérante, elle devient exécrable avec ces antagonistes qui sont aussi hideux que dans le mauvais Jack the Giant Slayer de Bryan Singer.
Plus problématique encore est le dernier tiers du long métrage qui est particulièrement risible. Les rencontres, les retournements de situations, le règlement du conflit principal: c'est tellement grotesque que cela finit presque par détruire complètement la magie qui faisait si bien son effet jusque-là. À moins d'apprécier les farces de flatulences, qui sont heureusement moins prononcées que dans Swiss Army Man.
S'il ne faut surtout pas comparer The BFG à E.T., on sent néanmoins que Spielberg a un peu perdu de son lustre au fil des années. Il est devenu un technicien incroyable, utilisant de nombreux effets spéciaux probants et une 3D bluffante pour recréer le moindre de ses fantasmes. On cherche pourtant le coeur et l'émotion qui manquent trop souvent à l'appel, si ce n'est peut-être dans le dernier plan. On est très, très loin de The Iron Giant qui fait pleurer à chaque fois. Ou même de l'éponyme dessin animé britannique de la fin des années 80. Ce film n'est que gentil, mignon et naïf alors qu'il aurait pu être bien plus.