Pour sauver ce qui lui reste de carrière, M. Night Shyamalan revient avec The Visit au suspense intriguant qui a lancé sa carrière en travaillant avec un budget extrêmement modeste. Malgré quelques efforts louables, c'est peine perdue.
Le passage de l'enfance à l'âge adulte. Une famille au bord du précipice. Des secrets tenus dans l'ombre. Une ambiance de fin du monde où tout peut arriver. Un soupçon d'éléments surnaturels qui se matérialisent peut-être et un rebondissement final. The Visit n'aurait pas pu être réalisé par quelqu'un d'autre que M. Night Shyamalan et contrairement à ses précédents After Earth et The Last Airbender, il ne s'agit pas d'un échec retentissant.
Il y a même de l'espoir qui ressort de cette prémisse prometteuse sur deux adolescents qui visitent leurs grands-parents qu'ils ne connaissent pas et qui ne doivent ni sortir de leur chambre après 21h30 ni visiter le sous-sol. C'est Hansel et Gretel qui rencontrent Le Petit Chaperon rouge. Le mystère s'impose rapidement et les acteurs, tous inconnus, se tirent admirablement d'affaire.
C'est bien mal connaître l'homme derrière The Village qui, depuis plus d'une décennie, trouve toujours un moyen de gâcher ses efforts. Son scénario stupide et grotesque digne d'une série B ne fait aucun sens et le cinéaste semble l'assumer, tâtant l'horreur sans jamais faire peur, versant allègrement dans la comédie burlesque. Il se permet même un détour vers le drame spirituel et émotionnel, tentant d'offrir une profondeur à ses personnages et des raisons pour expliquer le comportement de ses antagonistes. Cela donne une conclusion aberrante sur la nécessité de cicatriser les plaies du passé avant qu'il ne soit trop tard.
Sa mise en scène s'inscrit dans l'air du moment avec ces héros qui passent leur temps à tout filmer autour d'eux. Depuis The Blair Witch Project, il s'agit certainement du millième long métrage à reprendre ce procédé. Ce n'est toutefois pas le pire, le réalisateur ayant la présence d'esprit d'offrir une réflexion sur le cinéma - et les apparences - qui s'avère beaucoup plus subtile que sur son pitoyable Lady in the Water.
Une fois passée cette révélation tardive qui se devine au bout de cinq minutes, il reste un quart d'heure plutôt efficace qui, à l'instar de son mal-aimé The Happening, se regarde comme un plaisir coupable. C'est là qu'on sent que le créateur se libère enfin d'un poids sur ses épaules - celui de manipuler et de surprendre tel un simple émule d'Alfred Hitchcock - pour enfin s'amuser un peu. Un peu plus et on croirait voir surgir de l'obscurité l'ombre de Vincent Price.
Et si derrière sa prétention et son ton trop sérieux, The Visit n'était qu'une grosse farce? Un doigt d'honneur de M. Night Shyamalan qui se fait vilipender par tout le monde depuis son excellent triptyque formé de The Sixth Sense, Unbreakable et Signs? Cela n'en fait pas un meilleur film pour autant ou son retour tant espéré, mais une façon de ne pas perdre complètement la face. Au moins, il n'y a pas le fils de Will Smith au générique...