De tous les cinéastes québécois, François Girard est certainement le moins productif. En réalisant trois films en plus de 20 ans, cela lui a donné le temps de faire sa main au théâtre, à l'opéra et au cirque. C'est non sans joie de le voir revenir au septième art avec Boychoir.
Ce nouveau récit s'inscrit dans la lignée directe de Whiplash et La passion d'Augustine. Un prof exigeant et sévère fait baver un jeune élève qui a des problèmes de comportements. On ne comprend pas trop ce qui motive le "méchant" adulte, l'histoire l'explique difficilement, mais le jeune Stet (Garrett Wareing), 12 ans, qui n'a plus de mère et dont le père vient de le placer dans une prestigieuse institution de musique a maille à partir avec les étudiants de son âge et avec le respecté Carvelle (Dustin Hoffman) qui voit en lui un talent inné pour le chant.
C'est Billy Elliot qui rencontre Les choristes. Le long métrage ne prend même pas la peine d'échapper à ses deux références. Le scénario, vu des dizaines et même des centaines de fois, déambule à nouveau dans ces chemins tracés d'avance, offrant des dialogues attendus où les morales et le mélo se succèdent. Si seulement il y avait des échappées plus sombres à la Torment (la fresque d'Alf Sjöberg que Bergman avait scénarisé) qui aurait permis à l'effort d'intéresser un auditoire adulte alors que là, le ton est beaucoup trop enfantin.
Un manque flagrant de nuances et de surprises qui s'agence mal à la mise en scène terriblement conventionnelle et académique. François Girard a toujours habitué le cinéphile à une inventivité de tous les instants (Thirty Two Short Films About Glenn Gould), à un surplus d'émotions déchirants (The Red Violon) et à un travail ambitieux sur le plan esthétique (Silk). Des éléments importants qui font défaut tant son dernier essai paraît plaqué et anonyme.
Ce qui sauve le film du marasme tient à peu de choses. À ces mélodies qui coulent de source et dont les chants ne tardent pas à enivrer. Et à ces comédiens dévoués à leur cause, dont les jeunes interprètes offrent des performances rafraîchissantes. Garrett Wareing est une véritable révélation et il arrive à tenir tête à presque quiconque se dresse devant lui grâce à un solide jeu physique. Bien sûr, il ne peut rien face à l'immense Dustin Hoffman qui semble toujours habité par ses personnages. On sent cependant que la vedette se serait encore plus laissée aller si elle avait été aux commandes de la réalisation (la musique est son dada, comme le prouve son récent Quartet). Et malgré toute cette force d'impact, les personnages ne trouvent jamais la profondeur qui leur revient.
Boychoir relève donc du simple numéro d'acteurs. Comme le sont de nombreuses productions qui prennent l'affiche à chaque semaine. De quoi intéresser un jeune public ou leurs grands-parents qui n'ont pas eu de nouvelles d'Hoffman depuis longtemps. C'est déjà pas mal, mais c'est trop peu dans une filmographie comme celle de François Girard qui a trop de talent pour se satisfaire de cela. Sa musique intérieure marque généralement les esprits et on la cherche, ici, autrement, que par l'apport de garçons qui ont vu trop souvent Les choristes.