C'était à prévoir. Nos cinéastes québécois ne pouvaient pas tous réussir à Hollywood. Jean-Marc Vallée est devenu un formidable directeur d'acteurs, Denis Villeneuve se voit confier des projets de plus en plus imposants et Ken Scott, après avoir offert un remake de son grand succès Starbuck, risque de revenir au pays suite à la déroute de son embarrassant Unfinished Business.
Rarement un film n'aura aussi bien porté son nom que Unfinished Business. Tout est dans le titre. Le travail n'est pas terminé. Le script de Steven Conrad n'est pas au point. Il lui manque encore des semaines, des mois, voire des années de peaufinage pour donner quelque chose de satisfaisant. Dans cet état embryonnaire particulièrement éparpillé, c'est le désastre total.
Pas que la prémisse ne soit pas intéressante. Suivre Vince Vaughn, Tom Wilkinson et Dave Franco dans les rues d'Allemagne pour sauver leur compagnie peut donner un bon sujet de comédie. Surtout que la bande-annonce était prometteuse. Sauf qu'elle comportait toutes les scènes qui faisaient sourire. Le reste est consacré à du remplissage et à des pertes de temps. À des jeux de mots désastreux (il y a vraiment quelqu'un dont le nom de famille est Pancake) et à des blagues à caractère sexuel qui ne lèvent pas. C'est un art de maîtriser le mauvais goût et le scénariste ne s'en approche même pas.
Déjà qu'il essaye d'insuffler de la profondeur à son long métrage complètement disjoncté. Le fils du protagoniste se fait harceler à l'école et il n'a pas une bonne estime de lui. Des subtilités qui tentent de rendre les personnages humains, mais qui ne font que faire dérailler encore davantage le récit. Ces séquences supposément tendres et émouvantes sont accompagnées d'une mélodie légère qui devient par moment ironique et qui désamorce tout le travail. En voulant faire le grand écart entre la farce grasse et le drame bienveillant, la production se casse complètement la gueule.
Personne ne peut la secourir. Ken Scott propose une réalisation téléguidée, vulgaire par endroits, qui est indigne de son talent. Il n'a jamais offert de grands films et même s'il n'était pas totalement satisfaisant, Delivery Man se regardait avec un certain plaisir. Il n'y a rien de tout ça ici. Son second effort anglophone aurait pu être mis en scène par n'importe qui tant il ne possède aucune personnalité.
Capable d'être un bon acteur lorsqu'il est bien dirigé (pensons seulement à Swingers ou Wedding Crashers), Vince Vaughn est en chute libre depuis trop d'années et il offre encore et toujours le même type de performance. Ses camarades de jeu sont cependant trop accaparés à boire la tasse, ce qui les empêche de lui voler la vedette. Dave Franco émeut et énerve tout à la fois, Tom Wilkinson devra à l'avenir signer une clause qui l'empêchera de participer à des comédies stupides et les généralement potables James Marsden et Nick Frost sont extrêmement mal utilisés.
Unfinished Business aurait très bien pu être la rencontre entre Jerry Maguire (pour le héros qui décide de quitter son emploi pour partir à son compte) et The Hangover (pour le trio qui se complait dans les niaiseries). Au lieu de ça, il s'agit d'un suicide artistique qui ne fait pratiquement pas rire. Vince Vaughn est habitué à ce type d'échecs. Mais est-ce que Ken Scott aura la chance de s'en relever? Rien n'est moins sûr.